Élèves de 6ème SEGPA du collège Alphonse Allais |
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Il
était une fois une très belle princesse qui
vivait avec
ses riches parents, qui étaient roi et reine, dans un grand
château en argent, aux escaliers d’or,
décoré
d’objets de chevalerie. Une cour immense, dans laquelle il y
avait
des écuries et un maréchal ferrant, faisait le
tour du
château. A l’intérieur du
château il y avait des
cachots et des gardes du corps. La princesse était brune
avec
des mèches blondes, elle avait des cheveux très
longs,
doux comme la queue d’un chat. Ses yeux ovales, bleus comme
un ciel
d’été, sous des sourcils fins et bien
arrondis et des
cils pas très grands, étaient malicieux comme
ceux d’un
lutin. Elle portait des lunettes. Elle avait des lèvres
rouges
et brillantes et des petites dents carrées très
blanches car elle les brossait tous les jours, des oreilles bien
collées et un nez un peu arrondi. Sa peau était
blanche
comme la neige, lisse comme un foulard de soie. Tout le monde
admirait ses petits pieds aux ongles courts, épais et
brillants. La princesse avait tout pour être heureuse. Elle
partageait une vie merveilleuse avec ses parents. Elle avait des
bijoux en or et en argent, de belles robes pour aller au bal, un lit
à baldaquin pour dormir et pour ses promenades un carrosse
rose tiré par des chevaux blancs. Elle mangeait ce
qu’il y
avait de meilleur, surtout des fruits et de la salade pour ne pas
grossir.
Mais un jour la chance se mit à tourner, ses parents moururent, la princesse perdit peu à peu sa fortune et finit par se retrouver dans une misère noire. Elle était tellement inquiète qu’elle n’arrivait plus à fermer l’œil, elle passait des nuits blanches à pleurer, souffrait de maux de tête et était obligée de prendre des somnifères à base de plantes pour réussir à dormir un peu. Pour se nourrir elle volait des fruits et des légumes dans les champs et les jardins. Elle portait à présent des vêtements déchirés, elle n’avait plus qu’un bout de tissu en guise de robe, ses chaussures avaient perdu leurs talons, elle allait pieds nus comme une pauvresse et tout le monde se moquait d’elle.
Un soir, près de la rivière, alors que la malheureuse pensait à tous ses problèmes, elle entendit un petit bruit. Etonnée, elle leva les yeux et vit un minuscule fantôme sortir de l’eau, laid à faire peur. Il était enveloppé dans un immense drap blanc qui flottaitautour de lui. La princesse crut qu’elle rêvait. Elle avait très peur. Elle allait se sauver quand le fantôme cria son nom d’une voix grave et sèche et lui posa cette question :
Juste après il lui fit une horrible grimace en guise de sourire et la princesse, d’abord épouvantée, finit par lui raconter son histoire : la mort de ses parents et sa richesse perdue. Le fantôme lui dit alors :
La princesse pensa qu’elle pourrait lui donner le prochain cheval qui viendrait au monde dans son écurie. Alors elle dit oui aux propositions du fantôme et celui-ci s’enfonça tout au fond de l’eau. Laura, pleine d’espoir pour le futur, revint toute contente dans sa cabane en bois et en carton. À la nuit tombée elle sortit de chez elle pour aller voir son ancien château, celui qu’elle avait dû abandonner à la mort de ses parents. De loin elle aperçut un bout de son carrosse tout abîmé. Les chevaux n’étaient plus là. Elle entra dans les écuries et demanda au maréchal ferrant où ils étaient passés. Il lui dit qu’il les avait vendus. Elle pénétra dans le château et vit dans la grande salle le canapé tout craqué, son lit à baldaquins pourri par l’humidité. Elle alla dans la chambre de ses parents et entendit grincer la porte de l’armoire. Elle l'ouvrit et vit les robes de sa mère mangées par les souris.
Pleine de chagrin elle s'apprêtait à rentrer chez elle lorsqu’elle aperçut un homme qui avançait lentement dans sa direction. Quand elle vit de plus près l’étrange créature au long manteau noir, elle se rendit compte que c’était un vampire. Son visage était pâle, il avait des lèvres rouges pleines de sang et dégageait une affreuse odeur de bière et de transpiration. La princesse se mit à hurler et se sauva à toute vitesse. Après avoir couru longtemps, elle s’arrêta toute essoufflée pour se reposer un peu, croyant avoir semé l’horrible créature, quand tout à coup elle la sentit derrière elle. Elle se débattit faiblement quand il essaya de la mordre. Elle eut juste le temps d’entendre le galop d’un cheval avant de s’évanouir. Un prince, qui passait par là, entendit la voix terrifiée de la princesse et comprit tout de suite le danger qu’elle courait. Il se précipita sur le vampire, lui trancha la tête avec son épée et transporta la princesse évanouie sur son cheval blanc. En la voyant si belle et si douce, il en était tombé éperdument amoureux… Il l’emporta dans son château et la soigna jusqu’à ce qu’elle se réveille.
Un an plus tard, la jeune princesse, qui avait épousé le prince et retrouvé le bonheur et la richesse, donna naissance à deux superbes jumelles qu’elle appela Marjolaine et Justine. Après la naissance des jumelles, la princesse, qui avait peur que le fantôme ne sorte de l’étang pour lui réclamer l’une d’elle, ne passa plus jamais près de la rivière et empêcha ses deux filles d’aller jouer près de l’eau. Les filles étaient étonnées. Marjolaine, la plus curieuse et la plus désobéissante, demandait souvent à sa mère :
Mais la princesse ne répondait rien ! Les jours passèrent et plus personne n’entendit parler du Fantôme de la Rivière. La princesse reprit une vie normale avec son époux et ses enfants, aussi heureuse que lorsque ses parents étaient encore de ce monde. Marjolaine et Justine étaient devenues de belles adolescentes, presque en âge de se marier.
Un
jour Marjolaine aperçut un cheval d’un blanc
éclatant,
qui ressemblait à une licorne. Elle voulut le caresser et ne
put résister à l’envie de le
chevaucher. À
peine était-elle montée sur son dos que la
licorne se
dirigea au grand galop vers la rivière et plongea dans les
profondeurs de l’eau, emportant avec elle la jeune fille pour
la
remettre au fantôme. Elle sortit de l’eau en criant au secours et dit en sanglotant à son mari et à Justine qui venaient d’arriver :
Son mari allait lui aussi sauter dans l’eau dans l’espoir de sauver sa fille quand tout à coup de petites vagues agitèrent la surface de l’eau. Le fantôme grimaçant apparut dans la clarté de la lune, sans la jeune fille. Il s’adressa aux parents en ricanant, juste avant de disparaître :
Les parents désespérés eurent l’impression d’entendre des cris d’enfant et aperçurent la chaussure rouge de Marjolaine qui flottait sur l’eau. Justine, la sœur jumelle de Marjolaine, cria de toutes ses forces :
Elle appela en vain. Désespérés de ne pas avoir pu sauver leur fille, la princesse et son mari retournèrent chez eux en emmenant de force Justine, qui refusait d'abandonner sa soeur jumelle et tenait serrée contre son coeur la chaussure rouge de la jeune fille. La nuit, la princesse fit un rêve bizarre : elle courait le long d'un chemin dans une forêt sombre où il y avait des arbres aux formes étranges qui lui fouettaient le visage avec leurs branches, tandis qu'une neige épaisse lui cachait la vue. Elle était perdue et ne savait plus où aller. Arrivée au milieu de la forêt, elle voyait au loin un beau piano tout blanc, essayait d'en jouer et, dès les premières notes de musique, le soleil revenait et remplissait la forêt d'une douce lumière. Elle apercevait au loin une maisonnette en bois et, sans savoir pourquoi, criait « Maman » de toutes ses forces et voyait alors se dessiner au sol, devant la porte, les ombres de ses deux parents. Elle se sentait toute joyeuse à l'idée de les revoir et s'apprêtait à courir vers eux quand là, brutalement, elle se réveilla, trempée de sueur et essoufflée comme si elle avait marché toute une journée.
À son réveil, elle décida de retrouver la maisonnette qu'elle avait vue dans son rêve. Sans rien dire à personne, elle se dirigea résolument vers le milieu de la forêt, loin de chez elle. Tout se passa comme dans son rêve : elle chemina péniblement dans la forêt touffue et ennneigée, retrouva le piano, joua une douce mélodie qui fit apparaître un soleil doré, vit la maisonnette, cria « Maman » et à ce moment précis, se retrouva pour de bon en face de ses parents, bien réels, ridés, les cheveux tout blancs, qui l'accueillirent gaiement et la prirent dans leurs bras. Son père lui dit tendrement en la regardant au fond des yeux :
La jeune femme raconta toutes les aventures qu'elle avait vécues depuis leur mort. Elle parla du Fantôme de la Rivière et de la disparition de Marjolaine. Les deux vieillards aux cheveux blancs se regardèrent et lui dirent :
Sa mère lui tendit un trèfle à quatre feuilles et lui dit :
La princesse embrassa ses parents et prit le chemin du retour. Un mois plus tard la jeune femme, qui avait perdu le sommeil et surveillait le ciel toutes les nuits depuis la tour du château, vit surgir de derrière les nuages une gigantesque étoile de mer qui brillait autant que la lune. Elle courut à la rivière, effeuilla le trèfle et lança les pétales dans l'eau. Elle n'attendit pas longtemps. L'eau commença à bouillonner, les pétales de trèfle disparurent et la tête de Marjolaine émergea de l'eau. La jeune fille regardait sa mère avec des yeux implorants. La princesse s'approcha mais très vite l'eau se referma et engloutit la pauvre enfant. La rivière retrouva son calme, éclairée par l'étoile de mer qui se reflétait dans l'eau, tandis que le rire inquiétant du fantôme résonnait dans toute la forêt. La princesse Laura, croyant que tout était perdu, retourna chez elle en sanglotant. Mais la même nuit, alors qu'elle venait de s'assoupir entre les bras de son époux, brisée par le chagrin et le désespoir, elle refit le rêve étrange qui l'avait conduite jusqu'à ses parents. Au petit matin, elle décida de retourner au Royaume des Morts pour demander conseil à ses parents. Ceux-ci ne semblèrent pas étonnés lorsque la jeune femme leur dit ce qui s'était passé. Sa mère lui tendit un cœur en or en lui disant :
La princesse fit ce qu'avait dit sa mère : lorque l'étoile de mer apparut parmi les étoiles, elle se rendit à la rivière et frotta le cœur en or de toutes ses forces. Bientôt il resplendit de mille feux et elle le jeta dans l'eau. Une grosse vague vint lécher ses pieds et entraîna le cœur au fond de l'eau. La rivière devint aussi agitée qu'un torrent et un trou se creusa en son milieu. L'eau giclait de tous les côtés ! Au milieu des remous Marjolaine apparut, cette fois jusqu'à la taille. La jeune fille regardait sa mère en tendant les bras vers elle. Son regard était encore plus triste que la dernière fois. La princesse se précipita vers elle mais une énorme vague tira de nouveau Marjolaine vers le fond de la rivière. Le rire du fantôme retentit de plus belle ! La jeune femme rentra chez elle en pleurant. La princesse, ne voulant pas perdre espoir, retourna une troisième fois au Royaume des Morts. Ses parents l'attendaient à l'entrée du royaume, leur regard était rempli de bonté. La vieille femme la consola :
Mais avant de nous quitter embrasse-nous car c'est la dernière fois que nous nous voyons. Notre mission est terminée et nous allons enfin pouvoir nous reposer.
Sept
nuits et sept jours passèrent avant que l'étoile
géante
ne réapparaisse. Elle était à chaque
fois un peu
plus brillante ! La jeune femme s'appliqua à faire
exactement
ce que lui avait dit sa mère : elle défit le
collier et
jeta les perles dans l'eau jusqu'à ce qu'il n'en reste plus
aucune. La rivière ressemblait à une mer
déchaînée
et le rire du fantôme passait au-dessus du grondement des
flots. Au moment où elle lançait la
dernière
boule multicolore, une vague énorme rejeta Marjolaine sur la
rive. La jeune fille était pâle comme la mort,
elle
avait un regard vide et ne semblait pas comprendre ce qui se passait.
Sa mère la saisit par le bras et l'entraîna aussi
loin
que possible de la rivière pendant que le fantôme,
méchant et furieux de la voir disparaître,
s'énervait et jetait contre les
deux femmes vulnérables les eaux infernales. Mais il eut
beau
faire, rien ne put les arrêter et au petit jour elles
arrivèrent en vue du château. Marjolaine tremblait
tellement de froid et de peur que sa mère craignait qu'elle
ne
perde la raison. La jeune fille ne répondait même
plus
à l'appel de son prénom et ne semblait pas savoir
où
elle se trouvait. Le bonheur revint au château. Les deux jeunes princesses, Justine et Marjolaine, épousèrent deux frères jumeaux venus d'un autre royaume et on n'entendit plus jamais parler du Fantôme de la Rivière. FIN
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Atelier hebdomadaire d'écriture animé par Élisabeth Tardieu Octobre 2006 / Février 2007 |